Au Cameroun,
l’approvisionnement en électricité laissent encore beaucoup à désirer. Malgré
le fort potentiel énergétique du pays, les villes et les quelques villages
électrifiés vivent encore les coupures
intempestives et autres délestages. Si pour les entreprises cette situation
énergétique entrave leur productivité à long terme, pour les populations, les
coupures d’électricités sont la cause indirecte de plusieurs incendies et de décès.
Mylène Tchakouep, jeune femme de 35 ans, garde encore dans sa mémoire un
souvenir très vivace du décès de ses enfants. Il y a trois ans, la chambre
qu’elle occupait au quartier Makèpè, à Douala,
partait en flammes. À l’intérieur, endormis, son fils de 12 ans et sa fille de
7 ans. Rendue à une réunion de femmes, la bougie allumée pour leur permettre
d’étudier s’était renversée. Les flammes qui s’étaient rapidement répandues avaient
consumé les lieux et ses petits occupants.
Sauver des vies
Aujourd’hui, Mylène
n’utilise plus de bougies pour s’éclairer en cas de coupure d’électricité. Pour
chasser les ténèbres dans sa nouvelle demeure située au quartier Bédi, elle
utilise une lampe solaire. Cette solution, elle l’a adopté l’année dernière,
lorsque divers modèles de ces appareils ont fait leur apparition sur le marché.
C’est l’entreprise pétrolière Total qui s’est manifestée la première dans ce
secteur en commercialisant sa lampe solaire « Awango » dans ses
différentes stations-services. Coût de l’unité : 14 000 FCFA.
L’engouement des camerounais pour la lampe solaire, facilement rechargeable et
plus sûre, a poussé d’autres entreprises comme GN Solaire France à tenter
l’aventure dans le pays. Aujourd’hui, la lampe solaire se vend bien. À Yaoundé
et à Douala, on en trouve déjà dans presque toutes les quincailleries. Même
dans les rues, le nombre important de vendeurs ambulants qui proposent ces
appareils, généralement « Made in China », témoignent du succès qu’elle
rencontre auprès des populations. Le prix d’achat d’une lampe solaire varie selon
son type.
L’utile à l’agréable
Les plus prisées
sont les lampes solaires dotées d’un chargeur Usb pour téléphone portable. En
Afrique où le mobile est devenu incontournable, grâce aux différents services
qu’il rend (transfert d’argent mobile, santé mobile, conseils aux agriculteurs,
etc Ndlr) les lampes solaires résolvent bien de problèmes causés par le déficit
énergétique. « C’est vrai que la lampe solaire m’a séduite par son côté
pratique. On ne dépense qu’une fois, à l’achat. Sa recharge est simple. Elle
est sans danger, économique aussi. Plus besoin de dépenser pour des piles. Même
quand il pleut elle se recharge. Le fait qu’on puisse aussi l’utiliser pour recharger
son téléphone est formidable », confie Michel Bonono, agent d’entretien. L’énergie
solaire, il la connaissait juste de nom, à travers divers projets annoncés par
le gouvernement. Aujourd’hui, il l’expérimente. Pour le moment, il est encore
difficile pour un camerounais moyen de s’éclairer entièrement au solaire. Les
équipements coûtent très chers du fait de la taxe sur ces équipements. Un
panneau photovoltaïque de 60 Watt par exemple, soit l’intensité nécessaire pour
faire briller une petite ampoule de tungstène, coûte 75 000 FCFA.
La sécurité publique
À Yaoundé, avec
une capacité énergétique ne permettant pas de consacrer une partie de
l’électricité à l’éclairage public, la municipalité s’est elle aussi mise au
solaire. Son objectif, combattre l’insécurité qui prolifère dans la ville grâce
à l’obscurité. Depuis 2013, plusieurs projets d’électrification urbaine au
solaire ont été amorcés, à l’instar de celui mené en partenariat avec l’entreprise
technologique chinoise Huawei, sur la route qui mène à l’université de Yaoundé
2 Soa, célèbre pour ses accidents nocturnes mortels. Le déploiement de ces
équipements est en cours. Dans certaines zones obscures et dangereuses comme le
monument de la Réunification, situé vers l’Assemblée National, ou encore vers
l’Ecole Nationale Supérieure des Poste, la Communauté urbaine a aussi déployé
des lampadaires solaires. Ces appareils fonctionnent automatiquement selon une
horloge qui les allume dès le jour tombé et les éteint à l’aube. Lorsqu’il y a
coupure d’électricité, leur lumière apporte un certain réconfort aux populations.
L’initiative devrait se prolonger dans les quartiers.
Gagner de l’argent
Au-delà de l’éclairage.
Le solaire peut aussi être générateur de revenu, certes modestes. C’est ce qu’on démontré deux jeunes
adolescents du village Mindimi Oveng, dans la région du Sud. Pour gagner un peu
d’argent pendant la période des vacances scolaires passées chez leurs
grands-parents, ils ont eu l’idée d’offrir des services de recharge de batterie
pour mobile aux habitants du hameau et des villages voisins. Grâce à la lampe
solaire qu’ils ont emportée avec eux, et son cordon de recharge de téléphone
portable doté de cinq prises pour mobile, ils ont pu gagner et mettre un peu
d’argent de côté pour la nouvelle rentrée scolaire prévue le 8 septembre
prochain. 100 FCFA le prix d’une recharge. En quittant leurs grands-parents,
ils comptent leur laisser la lampe solaire en cadeau. Elle leur permettra
de ne plus dépenser de l’argent pour acheter du pétrole destiné à leur vieille
lampe tempête. Elle leur apportera aussi un peu de sous.
Muriel Edjo